Hier soir, j’ai eu l’honneur d’être invité par Son Excellence Monsieur Emmanuel Besnier, Ambassadeur de France en Mauritanie, à la réception donnée à la Résidence de France à l’occasion du passage du Raid aérien Toulouse / Saint-Louis. On pourrait s’en tenir là, mais ce serait passer sous silence une dimension essentielle de l’histoire : celle de la mythique Aéropostale, qui résonne tout particulièrement pour un Mauritanien.
C’est en effet grâce à l’Aéropostale que la Mauritanie s’est inscrite dans l’histoire mondiale de l’aviation. Cette épopée légendaire et notre territoire partagent un destin étroitement lié : au début du XXᵉ siècle, la Mauritanie fut une étape incontournable de cette formidable aventure humaine et technologique.
Durant les années 1920, la compagnie Latécoère, devenue ensuite l’Aéropostale, traçait une ligne audacieuse : relier Toulouse à Dakar par la voie des airs. Pour atteindre l’Afrique de l’Ouest, il fallait franchir le Sahara.
C’est là que la Mauritanie se révéla essentielle, avec des escales d’étapes dans des villes comme Port-Étienne, l’actuelle Nouadhibou ou forcées Atar, le Banc D’arguin véritables points d’ancrage dans l’immensité et la rudesse du désert. Cette traversée fut souvent héroïque : accidents, pannes, mais aussi sauvetages spectaculaires ont forgé la légende de ces pionniers.
De grandes figures ont jalonné cette épopée. Parmi elles, Antoine de Saint-Exupéry, d’abord chef d’escale à Cap Juby, puis pilote de la ligne, chargé notamment en 1931 d’assurer chaque semaine l’acheminement du courrier en provenance d’Amérique du Sud, de Port-Étienne (Nouadhibou) jusqu’à Casablanca. C’est l’étape mauritanienne et les vols de nuit.
C’est dans ces séjours à Port-Etienne (Nouadhibou) à chaque liaison et ses expériences sahariennes en territoires maures qu’il a puisé l’inspiration de pages inoubliables comme Courrier Sud ou Terre des Hommes. Ses écrits témoignent de la solitude du désert mauritanien, de ses rencontres avec les populations nomades et des défis que relevaient ces aviateurs. Aux côtés de Saint-Exupéry, d’autres noms mythiques .,Jean Mermoz, Henri Guillaumet ont eux aussi affronté les immensités mauritaniennes.
Pour notre pays, cette aventure a laissé des traces durables : des pistes rudimentaires, des points de repérage, et surtout les premiers contacts humains avec une aviation naissante qui allait transformer le monde. Aujourd’hui, ce chapitre demeure un patrimoine partagé, à la croisée de la mémoire de l’aviation française et de l’histoire des routes sahariennes de Mauritanie.
En somme, la Mauritanie fut bien plus qu’une simple étape technique. Elle fut un terrain d’épreuve, d’héroïsme et de rencontres. C’est ici, dans nos espaces infinis, qu’une part de la légende de Saint-Exupéry et de l’aviation mondiale s’est écrite.
Des grandes figures, à l’image d’Antoine de Saint-Exupéry et de Théodore Monod, ont emporté avec elles un éclat de Mauritanie. Grâce à leurs récits et à leurs écrits, un fragment de ce pays s’est retrouvé posé, tel un trésor discret, sur les cheminées des salons, au chevet des lits, et dans la mémoire des lecteurs du monde entier.
Mohamed Mahmoud Ba Né
