Reconnaissance du mouvement IRA, « un acte historique dans le combat des droits humains en Mauritanie

sam, 01/01/2022 - 01:15

En remettant vendredi 31 décembre 2021 une attestation de déclaration définitive à l’ONG antiesclavagiste mauritanien, l’Initiative de résurgence du mouvement abolitionniste (IRA), le président Mohamed Cheikh Ghazouani offre à Birame Dah Abeid et à ses partisans le plus beau cadeau de fin d’année. C’est le sentiment que plusieurs cadres du mouvement IRA, étreints par l’émotion suite à la cérémonie de remise du quitus de reconnaissance de leur association, ont exprimé. Pour beaucoup d’entre eux, ‘’ c’est l’acte le plus historique dans le combat des droits humains en Mauritanie ».

Prévu à 12 heures, la cérémonie de remise des récépissés de reconnaissance provisoire à quelques associations de droits humains, en application de la Loi 004-2021 relative aux associations, réseaux et fondations, n’a finalement eu lieu que vers 17 heures. Pendant plus de 5 heures d’horloge, les invités et activistes des droits de l’homme, ont attendu patiemment, vu l’historicité d’un évènement particulier, la reconnaissance officielle du mouvement IRA, le mouvement le plus diabolisé durant la décennie passée. 

C’est le Commissaire aux Droits de l’Homme, à l’Action Humanitaire et aux Relations avec la Société Civile, Cheikh Ahmedou Ould Ahmed Salem Ould Sidi, que le destin a choisi pour un acte aussi historique, ont cherché à immortaliser plusieurs invités dans les coulisses.

« Cette cérémonie marque le début de la mise en œuvre de la loi sur les associations »

Le Commissaire a exprimé sa satisfaction de présider la cérémonie de remise des récépissés provisoires à un certain nombre d’association, ce qui marque selon lui, « le lancement des procédures de mise en œuvre de la loi sur les associations que la société civile nationale attend depuis des mois et que beaucoup attendent depuis plus de six décennies ».

Il a rappelé que la nouvelle loi sur les associations, la loi 004-2021, qui remplace la loi de 1964 institue le régime déclaratif, plus conforme avec la norme internationale, que le régime des autorisations qui n’a plus sa place dans un monde démocratique.

D’autres améliorations qu’il serait long d’énumérer ont aussi été apportées selon le commissaire, qui retient le point le plus important, celui contenu dans le discours du président Ghazouani à l’occasion de la fête d’indépendance appelant à rapprocher les services de l’Etat des citoyens.

« A ce titre, nous avons créé une plateforme numérique en offrant un service à domicile qui permet au citoyen à partir de son smartphone de remplir les éléments de reconnaissance de son organisation et d’obtenir, au bout d’un délai, son récépissé d’organisation » a-t-il illustré.

L’intérêt accordé par le pouvoir actuel à la société civile, est dû selon le Commissaire aux Droits de l’Homme, au rôle important qu’elle joue dans le développement économique et social du pays et à sa place de partenaire dans l’élaboration, la conception et la mise en œuvre de tous les projets de l’Etat.

« Je cherchais un ami et je l’ai trouvé en Mohamed Cheikh Ghazouani »

Après avoir reçu son récépissé de reconnaissance des mains du Commissaire aux Droits de l’Homme, le député et président du mouvement IRA, Birame Dah Abeid, est revenu longuement sur le parcours de son association. Des débuts difficiles en 2008, d’un projet de société révolutionnaire bâti sur l’impertinence, avec ses lots d’exactions, de brimades, citant surtout le combat des femmes d’IRA, Birame a déclaré pardonner à son nom et au nom de sa famille proche, toutes les forfaitures commises à leur encontre par les éléments des forces de l’ordre et les magistrats.

Il a surtout salué le combat pacifique d’IRA et son respect des lois et des institutions, rappelant ses sorties sur toutes les tribunes du monde, le Sénat américain, le Parlement européen et les parlements africains. Il a aussi rappelé les prix de reconnaissance internationale qui lui ont été décernés, soulignant qu’il a enfin trouvé un ami, le président Ghazouani. « C’est un homme de parole et le seul défaut que je lui ai trouvé, est qu’il ne fait jamais quelque chose au moment où on s’y attend ». De ce fait, Birame a demandé aux Mauritaniens de faire preuve de beaucoup de patience avec Ghazouani.

Selon le président d’IRA, l’esclavage n’est pas propre à la Mauritanie. Ce sont les exactions contre les abolitionnistes qui avaient mis le pays sur la sellette internationale, explique-t-il en substance.

IRA s’ouvre de belles perspectives

« Les organisations internationales des droits de l’homme qui ont toujours attaqué la Mauritanie sur les tribunes internationales et dans la presse étrangère, seront bientôt ici pour s’imprégner davantage du nouveau deal entre les ONG nationales des droits de l’homme et les autorités » a affirmé Birame Dah Abeid, à la suite du discours qu’il a prononcé à l’occasion de l’octroi du récépissé de son organisation.

La reconnaissance d’IRA ouvre de belles perspectives à l’organisation, selon ses cadres. « D’abord, c’est un coup dur contre les féodaux et les esclavagistes qui se sont toujours opposés à cette reconnaissance, ce qui permettait à tout moment à leurs relais dans la presse de se délecter chaque fois qu’ils citaient IRA, de l’expression jouissive, « mouvement non reconnu ».

Cette reconnaissance permettra aussi à IRA de se porter partie civile dans les affaires d’esclavage, d’ouvrir des comptes bancaires et de recevoir des dons et financements extérieurs.  « En tant qu’association nationale à compétence territoriale, nous pouvons enfin mener nos activités en toute indépendance sans besoin de faire recours à une association tierce pour obtenir une autorisation » déclarent les cadres du mouvement.

Plusieurs autres associations des droits de l’homme ont reçu également leur récépissé de reconnaissance durant la cérémonie, sans toutefois jouir du même aura que celui concédé au mouvement IRA ;

Cheikh Aïdara