En Mauritanie, la rentrée politique est une notion peu connue. Puisque la politique est une activité de tous les jours ! Néanmoins, on peut considérer, à juste titre, que l’ouverture de la première session ordinaire de l’Assemblée nationale, sous l’ère Ghazouani, et l’attente des mauritaniens des changements qui accompagnent tout nouveau mandat présidentiel, méritent d’être scrutés par le regard d’un connaisseur.
Nous avons choisi pour vous, un cadre dont le profil ne laisse pas indifférent : Brahim Fall Mohamed Vall Mbareck, 48 ans, DG SBM (Société des bacs de Mauritanie), professeur, diplômé du département de langue et de littérature française de l’université de Nouakchott (1997), acteur politique qu’on ne présente plus à Rosso, étant vice-président de la section UPR, et également adjoint au maire de cette ville-frontière, exemple-type du brassage des populations en Mauritanie.
Nous pouvons considérer que l’ouverture de la première session parlementaire 2019-2020 correspond à ce que l’on nomme "la rentrée politique". Quels sont, pour vous, les dossiers les plus urgents ?
- Les dossiers sont ceux contenus dans l’offre politique choisie par la majorité des mauritaniens. On peut en citer entre autres : l’école républicaine, l’égalité des chances et l’emploi des jeunes. En d’autres termes, la lutte contre la pauvreté et le sousdéveloppement.
Et à Rosso, les priorités sont de quelle nature ? Politiques, sociales ou économiques ?
- Les priorités à Rosso sont à la fois politiques, sociales et économiques. Mais avec les orientations fermes de Son Excellence le président de la République et les ambitions déclinées dans la Déclaration de Politique Générale (DPG) du Premier ministre devant l’Assemblée nationale, je pense que ces quelques soucis relèveront de l’histoire ancienne. D’autant plus qu’il y a des perspectives fortes et prometteuses qui pourraient rapidement nous amener à cette ambition que nous voulons concrétiser très vite. L’exploitation prochaine du gaz, la construction du pont de Rosso et surtout les opportunités que va créer le port de Ndiago font que notre optimisme n’est pas déplacé. Je n’oublie pas notre statut incontesté de grenier du pays.
Il est peut-être nécessaire de revenir vers vous. D’opposant à militant engagé dans la majorité. Comment s’est opérée la mutation ?
J’ai effectivement été, il y a longtemps, militant opposant mais je n’ai jamais été un opposant à des personnes ou aux intérêts de mon pays. Au contraire, je voulais que la Mauritanie change et se mette au niveau des pays qui pèsent et qui comptent. C’est pourquoi, quand j’ai vu que mes aspirations et mes convictions de patriote se concrétisaient sous mes yeux, je n’ai pas hésité un instant à changer. L’opposition - ou le soutien à la majorité – ne sont pas des positions figées, des choix pour la vie. Moi, à un moment donné, convaincu que je fais le bon choix pour servir mon pays, j’ai pris mon courage à deux mains et je suis parti rejoindre le camp de ceux qui sont dans l’action et au service de la Mauritanie.
L’expérience militante acquise du temps où on était de l’autre côté, m’a amené à reconnaître que mon pays a éradiqué les bidonvilles, que des infrastructures dignes des pays les plus avancés existent, que les secteurs de la santé et de l’enseignement supérieur ont fait des bons significatifs. Et j’en passe.
Le président Ghazouani a été élu avec l’étiquette de "président du consensus" ? Pensez-vous que les premières démarches, notamment, la rencontre avec des leaders de l’opposition, vont dans ce sens?
- Effectivement, Son Excellence le président de la République, Mohamed Cheikh Ghazouani, avec les actes qu’il pose depuis son accession à la magistrature suprême, va dans le sens d’unir notre élite politique autour de l’essentiel et prouve, au besoin, que son manteau de président de tous les mauritaniens lui va bien. Enfin de compte, c’est la Mauritanie et son développement qui comptent, quelques soient nos divergences.
Ainsi, le Président, a voulu mettre fin à une tension artificielle que certains d’entre nous ne cessaient de vouloir rendre réelle.
L’Union pour la République (UPR) traverse une période de restructuration. Qu’est-ce qui pourrait changer en dehors de l’arrivée probable d’un nouveau Directoire ?
- Quelle que soit la direction qui sera choisie, notre parti restera le parti le plus grand, en terme du nombre d’adhérents et d’implantations sur l’étendue du territoire national et sera toujours la locomotive de la majorité présidentielle et cela grâce au nombre important de ses élus et au rôle prépondérant joué pour l’élection, au premier tour, du candidat du consensus national. Quand on restructure, c’est pour aller de l’avant, améliorer, être plus efficace, s’adapter à un nouveau contexte. C’est une évidence.
Le soutien de l’UPR à la politique du gouvernement a été acté par l’approbation de la DPG. Comment envisagez-vous la suite ? Une discipline plus rigoureuse ?
- Je demeure convaincu que ce parti, qui a largement contribué à l’élection du président, ne ménagera aucun effort pour accompagner ce président et son gouvernement à la réalisation de son programme électoral. Toutes autres perspectives relèvent de simples supputations.
Le Trarza est une région très politisée et un réservoir de cadres. Quel rôle peut-il jouer dans la volonté du président d’impliquer la diaspora dans le développement du pays ?
- Le Trarza est une Wilaya du pays. Elle a majoritairement choisi le président Mohamed Cheikh Ghazouani. Cette Wilaya ne se distingue en rien des autres régions du pays. Elle donnera, je n’en doute pas un instant, tout ce qu’elle possède pour la réalisation des engagements de l’homme qu’elle a choisi. Avec ses filles et fils sur le territoire national, et ceux à travers le monde, cette région répondra toujours présent pour l’œuvre de construction nationale. Et je suis convaincu qu'il en est ainsi de nos autres Wilaya et de leurs populations.
L’unité nationale, l’esclavage (pratique ou séquelles). Pensez-vous que "l’offre" du gouvernement apportera des changements appréciables ?
- Oui, je n’en doute pas un instant, le problème de la Mauritanie, comme tous les pays de son niveau économique, c’est le sousdéveloppement et la pauvreté. Justement, les mesures fortes, clairement annoncées par Son Excellence le président de la République dans son programme électoral, et dont on peut citer, la mise sur pied d’une nouvelle agence nationale avec des moyens conséquents, doublé de sa volonté ferme de faire désormais de l’école un moyen d’ascension sociale, contribueront, normalement, à amener les mauritaniens à tourner les pages du passé.
Justement, un mot sur l’école. Que faut-il réellement pour qu’elle redécolle ?
- Pour que l’école redécolle, il faut aider l’école publique à retrouver son lustre d'’ntan. Une école où se retrouveront tous nos enfants avec les mêmes enseignants, les mêmes outils pédagogiques. Une école qui verra tous les jeunes écoliers mauritaniens porter une tenue identique. Pour cela, il faut penser à améliorer les conditions de vie et de travail des enseignants et instaurer le principe de la sanction et de la récompense. Cette école doit être un créneau de rapprochement entre nos différentes composantes nationales à travers des colonies de vacances durant lesquelles nos enfants s’imprégneront de toutes nos cultures et langues nationales. Une école qui nous aidera, une bonne fois pour toute, à ne plus avoir recours à la traduction pour dialoguer entre nous.
Un dernier mot ?
- Je formule mes vœux les plus sincères pour l’émergence d’une Mauritanie prospère, réconciliée avec ellemême et tournée vers l’avenir. Je souhaite, du fond de mon cœur, la concrétisation de l’offre politique du Président de la République. Que notre élite politique taise ses querelles et différences et permettent au Président de dérouler le programme librement choisi par le peuple souverain.
Propos recueillis par : Mohamed SNEIBA