Des sages-femmes d’Afrique du Centre et de l’Ouest à Nouakchott pour apprendre à former dans les gestes qui sauvent

mer, 27/11/2024 - 01:30

Le véritable cauchemar d’une sage-femme ! Assister à la mort d’une mère ou d’un bébé sur la table d’accouchement. En Afrique de l’Ouest et du Centre, le drame est énorme. Les chiffres morbides sont les plus élevés au monde. D’où la frénésie des formations pour des soins de qualité. Nouakchott accueille ainsi du 25 novembre au 10 décembre 2024, une cohorte d’une trentaine de sages-femmes venus de près d’une dizaine de pays de la région du Centre et de l’Ouest africain. Objectif, apprendre les techniques du maître mentorat qui consiste à accompagner les sages-femmes dans les gestes qui sauvent.

L’Ecole Nationale Supérieure des Sciences de la Santé (EN3S) de Nouakchott, un centre d’excellence en mentorat clinique des sages-femmes, accueille du 25 novembre au 10 décembre 2024 la première session régionale de formation des maitres mentors venues de plusieurs pays d’Afrique de l’Ouest et du Centre. Bénin, Burkina Faso, Côte d’Ivoire, Guinée Equatoriale, Guinée Conakry, Mali, Niger, République de Centrafrique, Sénégal et Togo.

Organisée par le Ministère mauritanien de la Santé, avec l’appui du Fonds des Nations Unies pour la Population (UNFPA), cette session de formation de deux semaines est accompagnée par le Projet Autonomisation des Femmes et Dividende Démographique au Sahel (SWEDD), l’Organisation Mondiale de la Santé, l’UNICEF et plusieurs autres partenaires.

L’orientation clinique, une innovation de taille

Dans le mot qu’il a prononcé à l’ouverture officielle de la 1ère session de formation régionale organisée à Nouakchott pour les maîtres mentors en Afrique de l’Ouest et du Centre, le Secrétaire Général par intérim du Ministère de la Santé, Ely Ould Moida a bien pointé le curseur.

Selon lui, « l’objectif de cette formation est de développer les compétences des maîtres mentors qui formeront à leur tour des sages-femmes et des mentors dans le domaine des pratiques de santé maternelle et néonatale et de planification familiale ».

La finalité, ajoutera-t-il en substance, c’est d’accélérer la transition vers la portée de l’approche d’orientation clinique dans la région et contribuer à réduire la mortalité maternelle.

Il a ajouté que le projet SWEDD a développé trois centres d’excellence pour former les cadres de la santé des pays appartenant à sa zone d’intervention, dont la Mauritanie.

« L’orientation clinique est en bonne place, car inclue dans les stratégies innovantes pour accélérer la réduction de la mortalité maternelle dans le document publié par le Bureau Régional de l’UNFPA pour l’Afrique de l’Ouest et du Centre (WACARO) » a-t-il souligné.

Investir dans les sages-femmes, c’est sauver plus de 4 millions de vie

La Représentante résidente de l’UNFPA en Mauritanie, Dr. Olga Sankara, avait auparavant exprimé sa joie, au nom de l’UNFPA, de s’adresser aux participants dans cet atelier de partages d’expériences et de compétences, leur souhaitant la bienvenue en Mauritanie, « pays d’un million de poètes ».

Elle a salué la prise de conscience élevée face à la nécessité d’accélérer la réduction de la mortalité maternelle en période périnatale en particulier.

« Dans notre région, toutes les 4 secondes, une femme meurt en donnante la vie et toutes les 17 secondes, c’est un nouveau-né qui meurt » a-t-elle illustré, comparant l’hécatombe des mamans et des bébés qui meurent en Afrique de l’Ouest et du Centre au crash annuel de 1000 avions dont aucun des 200 passagers à bord ne survit.

Pourtant, déplore-t-elle en substance, il s’agit de morts évitables car, selon les données du rapport mondial sur la pratique sage-femme, en investissant dans les sages-femmes, 4,3 millions de vie seront sauvées d’ici 2035.

« C’est pour cela que Dr. Sennen Hounton, Directeur régional de l’UNFPA pour l’Afrique de l’Ouest et du Centre n’a pas hésité à fournir des ressources pour la tenue de la présente formation dont l’objectif est de développer une masse critique de maîtres-mentors qui à leur tour pourront former des sages-femmes et maïeuticiens mentors » a-t-elle précisé.

A ce titre, elle a rappelé que le mentorat clinique est inscrit en bonne place dans les stratégies innovantes d’accélération de la réduction de la mortalité maternelle dans le document qui vient d’être publié par WCARO.

Elle a enfin salué l’engagement de la Mauritanie dans la poursuite des efforts tendant à garantir à toutes les femmes et les enfants des soins de santé maternelle et infantile de qualité. En témoigne, selon elle, les mesures d’accélération qui sont en train d’être mises en place par le Ministère de la Santé et sa disponibilité exprimée à abriter cette formation.

D’autres orateurs s’étaient exprimés au cours de cette cérémonie officielle, en l’occurrence, le Directeur général de l’EN3S, Ahmed Ould Armyah.

La cérémonie s’était déroulée en présence des représentants de l’OMS, l’UNICEF et du SWEDD.

Cheikh Aïdara

TEMOIGNAGES DE QUELQUES PARTICIPANTES

Ahanhanzo Gléglé Clarisse épouse Agonglo du Bénin, Responsable nationale des soins obstétricaux

« Un sentiment de satisfaction de participer à cette formation de maitres-mentors. Vous n’êtes pas sans savoir que c’est toute l’Afrique de l’Ouest et du Centre qui sont regroupés dans cette session de formation. Cela constitue ainsi un creuset très instructif d’échanges d’expériences. Depuis hier nous apprenons beaucoup de choses. Nous avons travaillé dans la mise en œuvre du mentorat clinique. Nous avons beaucoup appris de nos collègues er affinons ce que nous faisons déjà au Bénin »

Amakoukoué Kayi Neeli du Togo, sage-femme au district de Kloto chargée de la maternité

« Nous sommes ici dans le cadre de la formation des maîtres-mentors, une formation indispensable pour toutes les personnes exerçant au niveau de la maternité. Nous sommes là pour renforcer nos compétences dans la réduction de la mortalité morbidité de la mère et du nouveau-né dans notre sous-région. Ce matin, nous avons vu comment sauver les mamans, comment à les aider à survivre. On sait que la première cause de la mortalité maternelle c’est l’hémorragie lors de la délivrance. Pour sauver les femmes dans cette situation, le facteur temps joue un rôle primordial. Il faut référer à temps car il faut sauver la maman et son bébé qu’il faut aider à respirer. Ce qui fait que tout le matériel de survie doit être présent dans la salle d’accouchement pour une prise d’urgence de la maman et de son nouveau-né. D’où l’importance de cette formation qu’il faut porter à l’échelle. »

Mme Diène née NGoné Guèye du Sénégal, responsable de la santé de la reproduction à la Direction de la Santé de la mère et du nouveau-né

« Nous sommes honorées du choix qui a été porté sur nous et de représenter le Sénégal. Nous espérons au retour de cette formation que nous puissions renforcer ce mentorat clinique qui est déjà mis en œuvre au niveau du Sénégal avec une dissémination dans plusieurs régions. Le choix avait d’abord porté sur deux régions pilotes, avec des critères de choix, en l’occurrence les progrès qui ont été réalisés par ces régions en termes de mortalité maternelle et néonatale, le leadership des managers entre autres. Il faut noter qu’au Sénégal, beaucoup de progrès ont été réalisés sans compter le mentorat qui a été introduit pour la lutte contre la mortalité maternelle, parce que le Sénégal a quand même réalisé une performance avec un taux de mortalité maternelle qui est passé de 396 à 156 décès pour 100.000 naissances vivantes. Un progrès à saluer même si ce taux reste élevé par rapport aux objectifs de 70/100.000 visés. Le taux de mortalité néonatale reste également très élevé, 23/1.000 naissances vivantes, alors qu’il faut aussi le réduire d’ici 2030. »