Responsabilité sociétale des entreprises : Où en sont les africaines

jeu, 24/03/2022 - 00:47

*Responsabilité sociétale des entreprises

Où en sont les africaines*

 

Les considérations sociales et environnementales s’invitent de plus en plus dans le quotidien des entreprises africaines. La responsabilité sociétale des entreprises ou responsabilité sociale et environnementale s’impose comme une politique transversale, s’immisçant dans la moindre décision. Aujourd’hui, comment ce concept, selon lequel les entreprises doivent intégrer les dimensions sociales et environnementales dans leurs activités, se décline-t-il dans le management des entreprises africaines ? S’agit-il d’un effet de mode ou d’un véritable engagement ? Peut-on parler de l’émergence d’un modèle RSE africain ?

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Nabila TBEUR, Head of «Act4community Platform», ocp Group

 

Le Groupe OCP tient son rôle d’entreprise à mission

 

Les considérations sociales et environnementales s’invitent de plus en plus dans le quotidien des entreprises africaines. La responsabilité sociétale des entreprises ou responsabilité sociale et environnementale s’impose comme une politique transversale, s’immisçant dans la moindre décision. Aujourd’hui, comment ce concept, selon lequel les entreprises doivent intégrer les dimensions sociales et environnementales dans leurs activités, se décline-t-il dans le management des entreprises africaines ? S’agit-il d’un effet de mode ou d’un véritable engagement ? Peut-on parler de l’émergence d’un modèle RSE africain ?

Ici comme ailleurs, la question reste posée ! Qui est le pionnier de la responsabilité sociétale des entreprises ? En la matière, le Groupe OCP, premier producteur mondial de phosphates et leader sur le marché des engrais phosphatés, a su se positionner comme figure d’exemple. En effet, il a fait de ces enjeux de sociétés le cœur de ses préoccupations. Son rang d’entreprise à mission a de tous les temps tourné ses actions vers l’intérêt général des personnes et communautés bénéficiaires. Et, c’est justement, ce que démontre Nabila Tbeur, responsable de la plateforme «Act4community» au sein du Groupe OCP dans l’entretien qu’elle a accordé à AFRIMAG. Interview.

 

AFRIMAG : Le Groupe OCP est pionnier de la RSE au Maroc. Pourquoi s’est-il très tôt engagé dans ce domaine ?

Nabila Tbeur : Ce n'est pas un déclenchement récent, en effet. Lorsque le Groupe OCP a été créé, il a fallu construire les villes autour de ses sites, à l’instar de Khouribga qui a été construite autour du phosphate. Il y avait donc dès l’origine une démarche globale de construction des villes, d'aménagement des territoires avec les autorités locales, de création d'infrastructures de base, d'écoles, d'hôpitaux, de centres de santé, etc. Ce n'est donc pas vraiment un engagement tout récent, mais cet engagement-là a connu plusieurs formes. Il a évolué en fonction du contexte, national et international aussi. La responsabilité du Groupe OCP vis-à-vis du Maroc c'est quasiment une cause nationale.
Par conséquent, cela va au-delà de la seule dimension RSE, qui est philanthropique pourrait-on dire, qui est mise en place dans de nombreuses entreprises. Cet engagement est beaucoup plus profond. Nous avons une mission qui va au-delà d'extraire et de valoriser le phosphate. Donc, je ne peux pas vraiment vous dire quel a été le déclencheur : c’est en fait un élément fondateur du Groupe OCP, 
la prise de conscience profonde que toute la richesse créée se doit d'être partagée de façon durable avec les communautés.

 

En matière de RSE, OCP mène une stratégie transversale avec des engagements tant sur le plan social, entrepreneurial, éducationnel qu’environnemental. Comment les actions du groupe sont-elles articulées en faveur justement de votre écosystème ?

En effet, notre démarche d’engagement auprès des communautés va beaucoup plus loin que l’approche philanthropique. C’est un ensemble de préceptes et de normes, qui sont à nos yeux un minimum, au regard de la complexité de l’écosystème d’une entreprise comme le Groupe OCP. Les normes et les standards, bien que permettant de rendre compte à l’international, ne sont pas une fin en soi !

De fait cette «RSE» se décline au niveau local, les programmes changent et s'adaptent en fonction du contexte et des besoins locaux, mais aussi de la maturité du groupe et de l'élargissement de son périmètre actuel. Concrètement le programme «Act4community», né en 2017, est l’aboutissement de tous les programmes précédents, et pourrait se résumer comme suit : comment mettre toutes les ressources du groupe, qu'elles soient humaines, financières, matérielles, au profit de programmes durables qui contribueront à l’autonomisation des communautés locales.

Plutôt que des programmes «tout faits» qui seraient trop verticaux et dirigistes, nous avons des groupes, composés de plusieurs personnes volontaires (certaines donnent jusqu’à 50% de leur temps) qui vont aller directement à la rencontre des communautés et surtout rester à l’écoute. Ces groupes existent au niveau des 5 sites ou nous opérons et s'interessent au sport, à la culture, à l'industrie ou encore à l'economie sociale et solidaire.

«Act4community» mobilise les collaborateurs volontaires autour de projets opérationnels réalisés directement avec les communautés. A ce jour, plus de 8000 collaborateurs participent à ces différents groupes dans tout le Maroc. Nos actions sont principalement orientées autour de la création d’opportunités d’emploi, par le renforcement des compétences des jeunes, des femmes, des petits entrepreneurs. Nous identifions les compétences et certifications nécessaires pour capter les opportunités business offertes par la commande OCP ou d’autres donneurs d’ordre sur le territoire. De nombreux produits et services du Groupe OCP sont en effet parfaitement réalisables par de petites structures locales. Et il a suffit que nous adaptions nos processus et nos commandes pour pouvoir directement commander auprès de ces partenaires. Nous avons actuellement plus de 200 petites entreprises qui ont pu être adjudicataires entre 2019 et 2021, qui ont pu capter des commandes à travers nous. Le cas du textile est particulièrement parlant. OCP a en effet, grâce à un programme réalisé en partenariat avec l’ESITH (Ecole Supérieure des Industries du Textile et Habillement), pu accompagner des couturières pour la fabrication des uniformes, des pantalons, des chemises, des tabliers, des blouses, etc. pour l’écosystème local.

 

Quelle est la place du développement humain dans votre approche RSE ?

C’est la pierre angulaire de notre approche. Comme nous venons de le voir, «Act4community» a pour objectif principal : le développement humain des communautés locales ! L’exemple des achats est parlant : nous pouvons faire localement certains produits et services que nous achetons chez des fournisseurs nationaux ou internationaux à un prix compétitif et avec la même qualité. Notre objectif ultime, c'est : avoir un tissu économique local, performant, autonome, au-delà de la seule commande. Mais bien sûr, notre rôle et notre responsabilité, c'est que la commande locale soit accessible à ce tissu économique local performant. Ce qui suppose des programmes de formation, d’accompagnement, mais pas uniquement.

Le développement humain c’est aussi l’aménagement des territoires grâce à des programmes d'infrastructures de base qui répondent à des besoins des communautés, des routes, des pistes, l'adduction de l'eau potable, de l’électricité dans le rural.

 

Comment se décline la RSE dans l'entreprise de manière générale ?

C’est une organisation complexe mais complète, et totalement décentralisée. On ne peut pas vraiment dire que la RSE se «décline». Au contraire : c’est toute notre organisation qui est fondée sur ses principes. Les volontaires et les projets accompagnés ou réalisés sont intégrés à la structure même d'OCP. Cette interaction permanente avec les communautés conditionne l’existence même du Groupe OCP.

Entretien réalisé par François Dry 

Source : AFRIMAG (MAROC)