Les résultats provisoires du scrutin du 29 juin 2024 sont tombés. Selon les décomptes de la Commission électorale nationale indépendante (CENI), le président sortant Mohamed Cheikh Ghazouani remporte l’élection présidentielle au premier tour, avec plus de 56% des voix. Il rempile ainsi pour un second mandat de 5 ans. Il est suivi par le leader antiesclavagiste, Birame Dah Abeid, avec un peu plus de 22%. Ce dernier a réfuté les résultats annoncés. Dimanche soir, il a conduit ses partisans dans une marche qui devait les conduire vers les locaux de la CENI.
Il n’a fallu que quarante-huit heures pour que les Mauritaniens soient fixés sur les résultats provisoires du scrutin présidentiel du 29 juin 2024. Il faut dire que la CENI a commencé à débiter les résultats par bureau une heure environ après la clôture du vote. Dimanche en fin d’après-midi, près de 98% des 4.503 bureaux de vote répartis sur le territoire national étaient déjà dépouillés et les résultats publiés sur le site Myceni, accompagnés des procès-verbaux.
Les premiers résultats à être publiés furent ceux de l’étranger. Si Hamady Mohamed Abdi, le candidat du parti islamiste Tawassoul est arrivé en tête dans les pays du Golfe arabique, Arabie Saoudite, Emirats et Qatar, Birame Dah Abeid avait raflé la première place en Europe, aux USA et en Côte d’Ivoire, en particulier.
Plié au premier tour
Le scrutin du 29 juin 2024 a été plié dès le premier tour avec un taux de participation de 55,39%, loin des 62% de 2019. Le président sortant, Mohamed Cheikh Ghazouani a été en effet déclaré vainqueur à l’issue du premier tour avec 56,12 % des suffrages exprimés, selon les résultats provisoires proclamés par la CENI. Les résultats officiels et définitifs seront annoncés dans quelques jours par le Conseil constitutionnel après examen de tous les recours introduits par les candidats contestataires.
Birame Dah Abeid confirme sa place de challenger avec 22, 10% des suffrages exprimés. Il a enregistré un bond quantitatif extraordinaire par rapport à ses 8% de la présidentielle de 2014 et ses 18% de 2019. Malgré ce classement qui en fait le deuxième homme fort du pays, il a contesté les résultats, estimant que s’il s’est tu pour « sa victoire arrachée en 2019 », il ne se taira pas cette fois, estimant être l’objet d’un « holdup électoral ».
En effet, lors de la conférence de presse qu’il a animée quelques heures après la fermeture du vote et le début des dépouillements au soir du samedi 29 juin, il avait demandé au président Ghazouani de « reconnaître sa défaite et de lui transmettre les clés de la présidence de la République », non sans accuser la CENI de fomenter un « coup fourré ».
Dimanche, il a mobilisé ses partisans pour une marche « pacifique » qui devait le mener de son domicile au PK 9 vers le siège de la CENI où il comptait organiser un sit-in pour protester contre les résultats. Son convoi a été bloqué par des éléments de la garde nationale à plusieurs kilomètres de sa destination. Son siège de campagne à l’Ilot K a été pris d’assaut par les forces de l’ordre qui ont évacué ses alentours et empêcher son staff et ses partisans d’y pénétrer.
En même temps, plusieurs manifestants sont sortis dans des quartiers populaires, comme Basra et Netek à Sebkha, mais aussi à El Mina et Nouadhibou. Des pneus ont été brûlés et quelques commerces vandalisés. Un climat de terreur qui a poussé le ministre de l’Intérieur, Mohamed Ahmed Mohamed Lemine dit Ould Houerthi à faire une sortie à la télévision nationale pour affirmer que « les forces de sécurité ont ramené l’ordre dans le pays, que la situation est sous contrôle et que les autorités ne permettront pas que la quiétude sociale et la paix civile soient mis en péril ».
Des irrégularités constatées
Plusieurs irrégularités ont été constatées par les différents états-majors des candidats. Sont cités, les déplacements d’électeurs en particulier des grandes villes comme Nouakchott et Nouadhibou vers des circonscriptions à l’intérieur du pays. Des bourgades hier dépeuplées se sont retrouvées avec des milliers d’électeurs comme la petite localité de Nimjat qui a permis à Ghazouani de remporter la région du Trarza. Sont aussi cités, les bourrages d’urnes, le renvoi de représentants de candidats de l’opposition, les votes multiples, la substitution d’électeurs, certains votant à la place d’autres, l’achat de conscience, à travers notamment l’utilisation d’institutions publiques, comme Taazour pour la Solidarité, le Commissariat à la sécurité alimentaire, les registres de l’Etat-civil, etc. L’implication des hauts cadres de l’Etat, ministres et autres directeurs centraux, avec maniement du bâton et de la carotte, des menaces de privation de services publics comme sanction pour les localités qui voteraient autrement qu’en faveur du président sortant, le chantage électoral.
Birame et d’autres candidats ont notamment promis de joindre toutes ces plaintes aux autres griefs qui nourriront les recours qu’ils déposeront auprès de la CENI et du Conseil constitutionnel.
Ces démarches seront entamées, selon leur porte-parole, dès qu’ils finiront leurs procédures de vérification des procès-verbaux en leur possession qu’ils compareront avec les résultats proclamés par la CENI.
Il faut noter que les observateurs internationaux lors d’une conférence de presse qu’ils ont organisé à l’issue du scrutin ont affirmé que les élections se sont déroulées en toute transparence et liberté et que la Mauritanie vient d’administrer une belle leçon de démocratie.
Cheikh Aïdara
Résultats de l’élection présidentielle du 29 juin 2024
Inscrits : 1.939.342
Taux de participation : 55,39%
Votants : 1.074.208
Bulletins nuls : 53.787
Bulletins neutres : 31.608
Suffrages exprimés : 988.813
- Mohamed Cheikh Ghazouani 554.956 56,12%
- Birame Dah Abeid 218.546 22, 10%
- Hamadi Mohamed Abdi 126.187 12,76%
- El Id MBareck 35.288 3,57%
- Ba Mamadou Bocar 23.617 2,39%
- Outoumane Antoine Soumaré 20.360 2,06%
- Mohamed Lemine El Wavi 9.875 1,00%