« TAAZOUR », pour une meilleure redistribution de la richesse

dim, 23/02/2020 - 18:18

L’annonce faite, le 29/11/2019, par la Présidence de la République de la création d’une Administration de mission dénommée « Délégation Générale à la Solidarité Nationale et à la Lutte contre l’Exclusion ‘‘TAAZOUR’’ est incontestablement l’un des actes forts par lequel le gouvernement lance, de manière officielle, la mise en œuvre du programme présidentiel "ta'ahoudati" (mes promesses).

 

 

Le communiqué précise que cette Délégation Générale de rang ministériel, directement rattachée à la Présidence de la République, regroupe les programmes et projets de lutte contre la pauvreté, l’exclusion et la marginalisation.

Dans l’exposé des motifs de la création d’une telle structure, la présidence de la République montre clairement que la Délégation Générale devra jouer le premier rôle dans la lutte contre la pauvreté et l’expression, de manière éloquente, de ce que doit être la solidarité nationale en apportant une aide substantielle à des centaines de milliers de mauritaniens victimes de l’exclusion et de la marginalisation.

Ce sont donc 200 milliards d’ouguiyas,  étalés sur cinq ans, qui vont être injectés dans des projets profitant de manière concrète aux couches défavorisés. Nul doute qu’il ne s’agit pas, comme cela peut germer dans l’esprit de certains, du prolongement de ces programmes et Plans (CSLP 1 et 2, et autre SCAPP) qui, sur plus de trois décennies, n’ont pas su apporter de réponses convaincantes à la problématique de la pauvreté, notamment en milieu rural.

« Taazour » tire sa force du fait que ce vaste programme fait consensus non seulement dans les résultats qu’on pourrait attendre de sa mise en œuvre mais aussi du fait qu’il vient concrétiser une idée chère au Président de la République, à savoir la mise en place « d’un Etat où la justice, l’égalité, la fraternité, la citoyenneté ne sont pas de simples concepts mais des valeurs fondatrices ».

Ce ne sera donc pas des actions ponctuelles, sélectives et de portées politiques limitées, mais bien un véritable système de protection sociale qui ne laisse personne au bord de la route. S’il prend en considération les aléas de l’histoire, en s’efforçant d’éliminer toutes les formes d’inégalités, le Programme a aussi vocation de renforcer la cohésion nationale, en agissant de manière objective dans les zones cibles. Cette ceinture de pauvreté qui couvre plusieurs zones du Gorgol, du Brakna, de l’Assaba et des deux Hodh, mais également ces « poches » qui n’épargnent aucune autre région du pays.

 

Une nouvelle stratégie de lutte contre la pauvreté

 

 

Le lancement du programme « Taazour » relève d’un constat évident : La pauvreté recule, mais pas suffisamment, selon les statistiques disponibles sur la période 2008-2014. Les efforts accomplis, jusque-là, nous ont fait passé du CSLP 1 et 2 à une Stratégie de croissance accélérée et de prospérité partagée (SCAPP) dont les données devraient être réactualisées, en cette année 2019, par une nouvelle enquête sur les conditions de vie des ménages nécessaire pour partir sur des bases saines dans la nouvelle stratégie de lutte contre la pauvreté annoncée par le président de la République, dans son programme électoral, et reprise, le 05 septembre 2019, par la Déclaration de politique générale (DPG) du Premier ministre, Ismail Ould Bodde Ould Cheikh Sidiya :

 « Afin de concrétiser l’engagement du Président de la République à traiter efficacement les conditions de vulnérabilité et de pauvreté vécues par un grand nombre de citoyens, le Gouvernement créera une Agence chargée de concevoir et de mettre en œuvre des programmes ambitieux visant à promouvoir le développement socio-économique des couches défavorisées. »

Dotée d’un budget conséquent de 200 milliards d’ouguiyas (sur 5ans), cette agence « s’appuiera sur le Registre Social qui couvrira l’ensemble des ménages pauvres et vulnérables et qui est appelé à devenir l’unique source de ciblage pour les familles pauvres et vulnérables. » Ses programmes témoignent tous de cette volonté de venir en aide, de manière efficace, aux familles les plus vulnérables : Le Programme de cash transfert TEKAVOUL sera étendu à 100.000 ménages. Le transfert trimestriel pour chaque ménage passera de 1500 à 3600 MRU.

La DPG annonçait également un nouveau programme dénommé « CHEILA » destiné à la modernisation des communes et Adouaba les plus pauvres sera lancé pour offrir des services intégrés d’éducation, de santé, de logement, d’aménagements hydro-agricoles, de semi-mécanisation de l’agriculture, d’énergie, de financement de la micro-entreprise et de formation professionnelle. Par ailleurs, les populations des quartiers précaires des principaux centres urbains bénéficieront de logements sociaux dans le cadre d’un nouveau programme dénommé « Dari ».

Le gouvernement n’ignore pas que l’aide aux pauvres passe par les bonnes performances économiques de l’Etat qui favorisent la redistribution de la richesse recherchée. Ces performances économiques seront suivies à travers des indicateurs macroéconomiques connus, comme l’accélération de la croissance (à maintenir au-delà de 7%, souligne la DPG) et de l’inflation (à maîtriser à moins de 4%). La stabilité des prix, la diversification de l’économie et la conduite de réformes structurelles permettant d’améliorer la compétitivité vont dans le sens de cette politique tendant à rehausser la productivité nationale dont rend compte un PIB s’inscrivant dans une tendance haussière certaine.

L’investissement public doit être orienté vers les secteurs porteurs mais, à lui seul, il ne peut aucunement permettre l’atteinte de ces objectifs, ce qui oriente les efforts du gouvernement vers une implication plus grande du secteur privé. Le Partenariat Public Privé (PPP), fortement encouragé par les partenaires techniques et financiers de la Mauritanie est une option en principe irréversible.

La diversité devrait être une des priorités du Gouvernement dans ce domaine, pour sortir le pays de la dépendance d’une économie de rente axée sur des exportations comme le fer, l’or, le cuivre et le poisson. Elle réside dans les services, le développement des ressources agropastorales et leur modernisation ainsi que dans l’économie numérique qui constitue une véritable opportunité pour les jeunes dans des pays qui ont le même profil que le nôtre.

Il reste qu’à partir de 2022, les premières exportations de gaz devraient offrir à la Mauritanie de nouvelles ressources qui permettront au gouvernement de renforcer le modèle économique dont les contours sont déjà précisés dans la DPG. Et qui seront d’un bon apport pour la bonne marche du programme « Taazour ».

 

Sneiba Mohamed