C’est une lapalissade que de dire que la réforme d’un système éducatif donné engage le devenir de toute une nation et sur plusieurs générations.
Eu égard à sa très grande sensibilité et à son déterminant rôle dans le devenir des individus en particulier et de la société en général, une réforme relève du plus haut niveau de l’Etat. C’est dire qu’elle est d’abord une décision éminemment politique.
Toute réforme éducative, qu’elle soit en Mauritanie ou ailleurs, procède par étapes successives logiques.
Tout d’abord, la décision de réformer un système éducatif relève exclusivement des prérogatives du chef de l’Etat et ce, conformément au projet de société qu’il envisage pour ses concitoyens.
Une fois le projet arrêté, il va sans dire qu’il doit être soumis aux instances parlementaires pour d’éventuels amendements avant d’être adopté.
A la suite de ces principales étapes, est promulguée la loi d’orientation instituant la réforme du système éducatif. Ladite loi d’orientation comme son nom l’indique définit les finalités et les grands axes de la réforme envisagée.
C’est alors qu’interviennent le ou les départements techniques chargés de l’éducation au niveau central. Ils ont la lourde charge de traduire les orientations définies en : programmes scolaires, curricula, emplois du temps, cartes scolaires et manuels scolaires…etc. c’est dire en aspects techniques applicables sur le terrain, en classe.
Enfin arrive l’ultime étape et non la moindre sans doute, la plus déterminante peut-être, dans toute réforme éducative, à savoir la mise en œuvre : L’application sur le terrain du travail conçu en amont, dans les officines des différentes administrations centrales concernées et que doivent dès lors appliquer dans leurs classes, les enseignants sous la supervision des personnels d’encadrement, les directeurs d’écoles, les inspecteurs et les conseillers pédagogiques.
Voici succinctement énumérées et dans l’ordre logique et chronologique, les différentes phases que devrait en principe observer toute réforme éducative.
Une réforme éducative ressemble à la guerre quant au processus de la prise de décision : Le chef de l’Etat décide de la guerre, le parlement adopte le projet, le ministère de la défense la prépare et prend les dispositions nécessaires et les soldats sur le terrain (terre, air, mer) sous le commandement de leurs chefs, exécutent.
Bref, c’est dire que l’initiative de l’élaboration d’une réforme éducative ne relève guère des prérogatives des départements ministériels contrairement à sa mise en œuvre qui, entre autres, constitue leur raison d'être. Il s’agit de l’aspect purement technique.
Où en sommes-nous quant à notre réforme envisagée ?
A voir les travaux déjà menés tels que la révision de certains programmes et les différents ateliers techniques organisés par le département, il est permis de penser que la mise en œuvre de la réforme est déjà entamée alors que les préalables institutionnels à ladite réforme ne sont pas encore établis. Nous avons commencé par le pédagogique, selon le ministre.
Ici, il y a lieu de se demander si on n’est pas en train de mettre la charrue avant les bœufs.
Enfin, Il faut avouer que les termes transitoires de "charger de la réforme" annexés de manière provisoire certainement au département de l’éducation auraient semé la confusion avec la mission technique de refondation des programmes à laquelle le département s’est attelé voilà bientôt deux ans. La réforme est une mission temporaire, elle ne nécessite pas une spécification dans la nomenclature du département.
Pour davantage de fiabilité et de viabilité, une reforme exige du temps et de larges consultations. Ledit dialogue en perspective offrirait l’opportunité idéale à saisir pour définir, tous ensemble, l’école de demain : l’école égalitaire, l’école citoyenne, l’école pour tous.
L’éducation est l’affaire de tous.
SIDI BOILIL