L’Union Pour la République (UPR), devenu Parti "INSAV" (Équité), depuis la tenue d’une session extraordinaire de son Conseil national, a un nouveau président en la personne de Mohamed Melainine Ould Eyih, ministre de l’Education nationale et de la réforme du système éducatif jusqu’à son élection à la tête du parti au pouvoir. Il succède à ce poste très convoité, pour sa proximité avec le Palais, à Sidi Mohamed Ould Taleb Amar, nommé il y a quelques mois ministre de l’Hydraulique et de l’Assainissement et qui avait présidé aux destinées de l’UPR dans des moments troubles dont le retour "perdant" de l’ancien président Aziz qui a cherché, vainement, à faire de la formation présidentielle un tremplin vers le pouvoir, et la crise sanitaire provoquée par la COVID-19.
Ainsi, la session extraordinaire du parti au pouvoir qui l’a vu changer de président et de nom peut être perçue comme une façon de rompre les amarres, définitivement, avec l’ère Aziz, le nom du parti ayant été choisi sous le magistère de l’ancien président empêtré aujourd’hui jusqu’au cou dans des affaires de gabegie portant sur des dizaines, voire des centaines, de milliards d’ouguiyas.
Le changement a également en vue les élections générales à venir (municipales, régionales et législatives, en 2023, et présidentielles, en 2024). Les manœuvres électorales ont déjà commencé par une réunion d’un comité interministériel présidé par le Premier ministre devant sans doute inscrire dans son agenda le changement de la Ceni (Commission électorale nationale indépendante) dont le mandat de cinq ans arrive à terme en avril 2023.
Le parti au pouvoir dont le nouveau président a annoncé une profonde refonte - pour ne pas parler de refondation - devra également envisager le retour rapide à la table des concertations nationales inclusives que l’opposition appelle "dialogue".
Ce sont toutes ces considérations de stratégies politiques qui a conduit le Président Ghazouani à checher l’homme de la situation pour continuer ce qui a été fait, comme restructuration au niveau du Parti et mobilisation constante de ses militants, par Ould Taleb Amar. Sur ce plan, Ould Eyih dispose de plusieurs atouts.
L’homme a en effet piloté admirablement bien une réforme du système éducatif national qui compte parmi les grands chantiers de "Taahoudati" (Mes Engagements), programme électoral du président Ghazouani qui a promis aux Mauritaniens une École Républicaine qui mettrait fin, dans un avenir très proche, aux dysfonctionnements nés des différentes réformes éducatives menées jusque-là.
En tant que Porte-parole du gouvernement (statut qui lui a été transféré lors du dernier remaniement ministériel), le ministre de l’Education nationale, qui devrait sans doute abandonné cette charge gouvernementale pour se consacrer à plein temps au parti "Insav", à fait preuve d’un sens politique aigu en répondant, chaque mercredi, aux questions d’une presse nationale qui vit du sensationnel.
Il faut peut-être souligner enfin, pour justifier ce choix de raison, que l’arrivée à la tête du parti au pouvoir d’un homme du Nord répond à la géopolitique mauritanienne officieuse, avec un président issu du grand Est et un Premier ministre du Sud du pays. Un premier "insav" (Équité) politique que les ressortissants des régions du Nord (Adrar, Inchiri, Tiris Zemmour, Dakhlet-Noudhibou) sauront apprécier à sa juste valeur.
En ce qui concerne le travail interne auquel Ould Eyih devrait s’atteler sans tarder, il s’agit sans nul doute de la reprise en main d’un parti politique certes bien assis politiquement, avec plus de 100 députés (sur un total de 159), l’ensemble des 13 conseils régionaux et la quasi totalité des communes du pays, mais qui connaît, à la veille de chaque échéance électorale, des querelles de positionnement sur l’échiquier politique local. La "fuite", il y a quelques semaines, d’un document ultra confidentiel attribué au ministère de l’Intérieur sur la Carte politique nationale faisant la part belle au leadership tribal et régional de certains barons du pouvoir à provoqué le courroux d’autres qui estiment que les "équilibres" et rapports de force internes ne s’expriment réellement que sur le terrain.
Dans son discours d’investiture à la tête d’un parti présidentiel replacé sur une nouvelle orbite, Ould Eyih garde donc un œil alerte sur toutes ces questions de stratégie politique pour une formation qui s’apprête à défendre ses acquis de 2018 (victoire éclatante aux législatives, municipales et régionales) mais également faire mieux qu’en 2019, en assurant à Ould Ghazouani un second quinquennat lui permettant d’aller au terme de ses promesses d’une Mauritanie de l’équité (INSAV).
Sneiba Mohamed