L’Association des Journalistes mauritaniens Amis du Littoral (AJAL), en collaboration avec le projet WACA Mauritanie, vient d’achever ce vendredi 20 décembre 2024, une formation de deux jours à l’intention d’une vingtaine de journalistes.
L’ouverture et la clôture de la session de formation a été assurée par le Directeur adjoint du Littoral relevant du Ministère de l’Environnement et du Développement Durable et le Coordinateur adjoint du projet WACA.
Pendant deux jours une vingtaine de journalistes, dont des membres de AJAL, ont suivi des communications sur les enjeux liés au littoral mauritanien et les défis relatifs à l’érosion côtière ainsi que l’avancée de la mer qui menace en particulier la ville de Nouakchott.
Défis liés aux menaces sur le littoral
Il a été établi que parmi les causes de l’érosion côtière, menaçant dangereusement le littoral mauritanien, figurent celles dues à des phénomènes naturels et d’autres liées à l’action de l’homme, comme l’enlèvement du sable sur le cordon dunaire, l’élargissement urbain et la dégradation du sol.
Parmi les solutions déployées pour contrer ces attaques du littoral, certaines sont basées sur la nature, comme la sauvegarde de la mangrove, et d’autres anthropiques, comme la construction de barrières artificielles, la régularisation de l’extraction dunaire, l’élaboration d’un plan de développement urbain, mais aussi la gestion des ressources en eau et l’élargissement de la coopération internationale dans le domaine de sauvegarde du littoral.
La construction de plusieurs infrastructures sur le littoral, tels que les ports et les hôtels, sans respect des normes environnementaux est une autre cause d’aggravation de la situation. Cet état de fait, notamment à Nouakchott, a transformé les côtes attenantes à la ville dans une ligne rouge.
Ajoutés à ces dangers, ceux causés par la poussée de nouvelles villes comme Chami etTanit, les 50 usines de moka, les trois axes routiers, les 7 hôtels construits en bordure de mer sans assurance sur leur respect par rapport aux normes, et bientôt l’exploitation du gaz aux larges de NDiago.
La ville de Nouadhibou serait aussi confrontée² aux mêmes agressions environnementales, en plus des pollutions causées par les usines de moka. Il s’agit notamment des menaces qui pèsent sur la Baie du Lévrier et l’urbanisation qui avance en direction de la Baie de l’Etoile.
Solutions envisagées
Ainsi, parmi les actions engagées pour préserver les côtes mauritaniennes, l’aménagement de 4 hectares à partir du port artisanal de Nouakchott, avec la plantation de 2400 arbustes avec deux espèces adaptées à son environnement. In finish, une promenade verte est prévue à cet endroit.
La gestion du littoral est cependant rendue complexe par la multiplicité des acteurs qui interviennent dans son domaine, tels que le ministère des Transports, le ministère des Domaines et du Patrimoine de l’Etat, le ministère des Pêches, le ministère des Mines et de l’Industrie, le ministère de la Défense, etc. L’absence de coordination entre ces différents acteurs a longtemps pesé sur la détérioration de la situation du littoral ce qui explique la création depuis quelques années d’une société de réaménagement du littoral qui s’active à apporter un peu d’ordre dans ce domaine.
Pourtant, les côtes mauritaniennes ont été longtemps considérées comme l’une des plus poissonneuses au monde, avec ses 750 kilomètres de plage, une superficie de 230.000 kilomètres-carrés composée de zones humides d’importance internationale comme le Banc d’Arguin avec ses 49 espèces d’oiseaux protégées, ses 30 espèces de mammifères marins dont 6 classées espèces protégées, 6 espèces de tortues menacées de disparition dont des tortues vertes, ajoutés aux 267 espèces d’oiseaux migratoires du Parc de Diawling, plus au Sud. Toute cette biodiversité, si l’on y ajoute les plantes aquatiques, est menacée par les dangers liés à la pollution marine, la détérioration des habitats naturels de cette riche faune, la destruction du littoral et l’avancée de la mer qui pèse sur des villes comme Nouakchott.
Le colmatage des brèches
La nature fragile des 750 kilomètres de côtes mauritaniennes a été mise en évidence par les experts qui ont rappelé l’existence de deux parcs naturels de classe mondiale à protéger et à préserver, le Parc national du Banc d’Arguin (PNBA) au Nord et le Parc National de Diawling (PND) au Sud. Un rappel a été également fait sur le cadre juridique et règlementaire sur le littoral, comme le Plan directeur d’aménagement du littoral de 2005 actualisé en 2008, avec un plan d’investissement et l’Ordonnance 2000-037 relative au littoral qui prend en compte les défis auxquels il est exposé.
Le contexte géomorphologique de cette zone est caractérisé au Nord par des côtes rocheuses, au Centre par des visières et des hauts fonds larges, et au Sud, où se trouve Nouakchott, par une plage sablonneuse rectiligne exposée et des bas cordons sur la partie la plus étroite du littoral. Au large, s’étendent des formations dunaires fertilisantes pour la mer, ce qui fait la richesse des côtes mauritaniennes et son écosystème ainsi que sa riche biodiversité. Tout cela contribue à la performance des services socio-écosystémiques importants qui permet le respect de la capture carbone.
Un essai a été inspiré dans ce cadre par les travaux d’Edouard Faure et Michel sur la reconstitution des principaux stades de la côte entre le Cap Timiris et l’embouchure du Fleuve Sénégal.
Il en ressort que la ville de Nouakchott est triplement menacé, les eaux de l’Aftout Essahili et celles d’Idini, et la position de la cité coincée entre la mer, les dunes de sable et les eaux souterraines. Ce qui fait que l’on ne peut installer à Nouakchott un système d’évacuation des eaux.
Mais la menace la plus dangereuse qui menace le littoral, d’après les experts, c’est l’action de l’homme, d’où un passage obligé vers la formation citoyenne environnementale. En détruisant le cordon dunaire pour satisfaire sa demande en BTP, le Nouakchottois a été son propre fossoyeur. Cela a créé les 21 brèches qui menacent sa survie et celle de la cité.
Au Sud du Port de Nouakchott, l’érosion est visible et s’étend au fil des ans, causée par les brises lames installées sur sa pointe avancée vers la mer. Le taux de dégradation est de 20 cm par an.
Ainsi, sur les 19 brèches jugées les plus dangereuses, le projet WACA va en colmater 9 et 10 le seront par la Société d’Aménagement du Littoral.
Beaucoup d’espoir reste cependant attaché à la modernisation de la ville de Nouakchott et les 50 milliards qui lui sont destinés. A moins que….
Cheikh Aïdara