Le dialogue versus 2025, la quadrature du cercle avec le retour de Moussa Fall

mer, 12/03/2025 - 00:51

Le dernier Iftar offert par le président Ghazouani dessine déjà les contours du prochain dialogue. Ce sera un remake qui risque de ramener la Mauritanie au point de départ. D’un côté, la traditionnelle coalition entre le parti au pouvoir, INSAF et les partis de l’opposition dite traditionnelle et le retour de Moussa Falla aux commandes. Tous partant pour un dialogue « à sens unique » selon leurs détracteurs. Et en face, une coalition de partis dits de l’opposition radicale amenée par Birame Dah Abeid et de jeunes loups qui appellent à une tabula rasa de la scène politique. Pour eux, le dialogue envisagé sent du déjà-vu.

De ses dernières entrevues avec les leaders politiques qu’il a reçus individuellement il y a quelques semaines, Ghazouani ne semble avoir mis la main que sur les leaders de l’opposition traditionnelle, « sa clientèle politique », selon un membre de l’opposition antisystème mené par Birame Dah Abeid.

Pour le leader antiesclavagiste, Birame Dah Abeid, qui dirige une vaste coalition de mouvements et de partis dont la majorité est en quête de reconnaissance officielle, le régime n’est pas encore prêt pour un véritable dialogue, sincère et inclusif.

Ce sentiment d’insatisfaction, il l’avait d’ailleurs exprimé dès sa sortie de l’audience que Ghazouani lui avait accordé. Birame avait clairement déclaré qu’il n’était pas entièrement rassuré sur la gestion du dialogue que le pouvoir agite depuis plus d’un an.

La désignation de Moussa Fall comme coordinateur du dialogue national semble donner raison à Birame, selon plusieurs analystes qui trouve que Moussa Fall n’incarne pas le renouveau.

Un IFTAR qui dessine les cartes

Les images de l’IFTAR offert par le président Ghazouani à la classe politique semble dessiner les contours du dialogue prochain, qui va prendre part, qui va s’absenter, qui mène la danse réellement.

La présence des leaders de l’opposition traditionnelle à cet IFTAR, notamment Messaoud, Ahmed Daddah, entre autres, est analysée comme un feu vert qu’ils ont accordé au pouvoir de participer au prochain dialogue.

Mais l’absence de Birame Dah Abeid a attiré l’attention. Interrogé à ce sujet, il a déclaré ne pas être prêt à entrer dans un dialogue unilatéral et dont les cartes sont toutes entre les mains du pouvoir. Prendre part à ce simulacre de dialogue, selon ses propos, va donner du crédit aux tenants de la nomenklatura politique.

Le choix de Moussa Fall

Moussa Fall en tant qu’homme politique, ancien du système, est différemment apprécié par les observateurs.

Certains le voient comme l’homme du moment. Ses partisans le décrivent comme un connaisseur de la scène politique, évoquant son passé riche en expérience en tant qu’homme du système, à travers les différents régimes qui se sont succédé et qu’il a servi avec loyauté.

Ces témoignages en sa faveur sont exactement ceux qui l’enfoncent aux yeux de ses détracteurs qui jugent qu’il est complice de toutes les tares qu’a connu le pays, qu’il a traversé plusieurs régimes sans avoir jamais été un agent du changement. Certains rappellent ses références d’ancien membre actif du mouvement subversif des années 60-70, les Kadihines, mais beaucoup trouvent qu’il s’est depuis avachi et qu’il a retourné sa veste de vieux révolutionnaire pour un costume d’aparachitik des pouvoirs militaires. Nombreux sont ceux qui doutent qu’un homme aussi ancré au cœur du système puisse incarner les aspirations de tous les acteurs politiques et s’imposer comme l’artisan d’un dialogue sincère et transformateur.

Cheikh Aïdara