Le projet de loi relatif aux symboles de l’Etat, porté en urgence de façon douteuse devant le Parlement et discuté en ce moment, suscite de nombreuses interrogations du fait qu’il vient en réaction officielle à la recrudescence des mouvements de protestations pour l’instauration de l’Etat de droit et des institutions mettant en exergue les inégalités criantes et l’absence de justice sociale entre les différentes composantes de notre peuple.
Nous, à la Fondation Sahel pour la défense des droits de l’homme, sommes convaincus que la Mauritanie a plus besoin de mécanismes pratiques permettant de favoriser la justice sociale et l’égalité des chances, atténuant les traces du racisme d’Etat et jetant les bases d’un Etat de droit solide où le culte de la personne, de la famille, de la tribu et de l’ethnie serait définitivement abandonné. Elle n’a nullement besoin de promulguer des lois contre le discours de la haine et pour la préservation de l’unité nationale et encore moins pour la protection des symboles de l’Etat.
Nous considérons que les 7 articles qui composent le présent projet de loi portant sur les symboles de l’Etat ne sont qu’une répétition d’articles déjà présents dans notre arsenal juridique. Ce projet de loi, de par son esprit et sa lettre volontairement flous et sujets à interprétation, vise clairement à :
- Restreindre la marge de liberté que nous avons arrachée par plus d’un quart de siècle de combat et de sacrifices
- Faire taire la voix des opprimés notamment les Hratine et les victimes du passif humanitaire dont les injustices subies constituent la principale entrave à l’unité nationale et une carence fondamentale sur le plan constitutionnel
- Mettre fin à la liberté d’expression et à toute manifestation d’opinion critique à l’égard des autorités et ouvrir la voie à la répression
- Couvrir certaines pratiques racistes en matière de nomination à des postes de responsabilité, de promotion et de recrutement et cautionner la main mise sur l’Etat par certaines familles influentes qui se partagent les rôles et justifient les exclusions depuis toujours.
Dans ce contexte, la solution globale juste et durable est une solution sociale de nature à promouvoir et enraciner les valeurs de tolérance et de fraternité en s’appuyant sur les critères suivants :
1- Respect des droits de toutes les composantes de notre société y compris celle des Hratine qui doit être inscrite dans la constitution au même titre que les 4 autres composantes ;
2- Promouvoir les droits humains et la culture démocratique à la place de la politique de répression orientée essentiellement vers une frange de la population et en épargnant d’autres ;
3- Instaurer le principe de la concertation et du dialogue inclusif et permettre à tous les citoyens de participer à la prise de décision.
Ainsi, après une lecture minutieuse du contenu du projet de loi portant sur les symboles de l’Etat, nous demandons avec insistance aux honorables Députés de le rejeter en bloc pour sauver nos acquis et préserver les valeurs de notre république en matière de droits et de libertés.
Enfin, nous tendons la main à toutes les forces vives du pays pour faire échec à cette mascarade et pour combattre les forces réactionnaires qui font main basse sur les décisions politiques.
Nouakchott, le 23/07/2021 Le Bureau Exécutif