Après une tournée réussie dans toutes les régions de la Mauritanie, selon ses partisans, la Coalition de l’Alternance amenée par Birame Dah Abeid sous les couleurs du parti SAWAB, ont parachevé jeudi 11 mai 2023, leur campagne électorale par deux régions symboles, Nouadhibou et Rosso.
Arrivée mardi 10 mai de Kaédi et d’Aleg, ultimes étapes d’une tournée dans les régions de l’Est, celles de la Vallée et du Brakna, la Coalition de l’Alternance conduite par son leader, Birame Dah Abeid, s’est rendue à Nouadhibou, la capitale économique, puis à Rosso où il a clôturé sa campagne électorale, le jeudi 11 mai.
Nouadhibou, la reddition
A Nouadhibou où le candidat Birame Dah Abeid avait battu Ould Ghazouani lors de la présidentielle de 2019, le réveil des troupes ne fut pas chose difficile, selon plusieurs observateurs. La foule était impressionnante au point de faire oublier le rassemblement monstre de Kiffa qui avait ébranlé la coordination locale du parti au pouvoir INSAF. Le Coordinateur du parti-Etat dans la région de l’Assaba, Ould Bouna et son équipe de campagne, avaient en effet reconnu avoir été surpris par la popularité de Birame, alors qu’ils l’avaient exclu de la compétition au niveau de la région.
A Nouadhibou, la Coalition de l’Alternance avait pratiquement rappelé aux ténors de la majorité qu’il fallait compter avec le poids électoral de Birame Dah Abeid dans leurs calculs au niveau local.
Los du gigantesque meeting organisé mercredi 10 mai 2023, plusieurs orateurs se sont succédés au micro pour galvaniser la troupe et réchauffer le plateau avant l’entrée en lice de celui que toute la population massée à ses pieds attendait avec ferveur.
En effet, la montée de Birame Dah Abeid sur scène a été accompagnée d’une salve de sifflements d’honneur, d’applaudissements et de cris hystériques.
Comme à son habitude, l’attaque fut frontale, contre les tenants du pouvoir et leur gestion catastrophique de Nouadhibou. Birame a touché du doigt, selon l’aveu de plusieurs participants, les maux dont souffre la population, le manque d’eau, le chômage des jeunes, le bradage des ressources halieutiques et minières au profit des multinationales. Attaque frontale aussi contre l’homme fort de la commune, Mohamed Vall Ould Bellal qui brigue un énième mandat, malgré la longue confrontation avec le pouvoir de Mohamed Abdel Aziz d’abord, puis celle de l’actuel président Mohamed Cheikh Ghazouani.
Mais pour Birame, Ould Bellal et le parti qu’il représente, le parti Karama, ne sont que l’autre face du parti INSAF au pouvoir. Selon lui, les deux formations de la majorité présidentielle sont complices de la mal gouvernance qui ronge le pays. Pour preuve, le procès en cours de l’ancien président Ould Abdel Aziz de la part de ces ex-compagnons aujourd’hui aux rennes du pouvoir, dévoile, selon lui, l’ampleur de la complicité qui a prévalu et qui continue de prévaloir au cœur de l’Etat mauritanien.
Il a promis de restituer les richesses volées au pays, pour soulager les souffrances d’un peuple acculé jusque dans son dernier souffle de vie. La faim, la pauvreté, la disparition du poisson, l’inaccessibilité des prix de consommation, est aujourd’hui son lot, dira-t-il en substance.
Selon lui, la coalition a déjà dépensé dans sa campagne, 32,5 millions d’ouguiyas limpides, soit moins de 3 millions par région, là où le parti INSAF a dépensé plusieurs milliards d’ouguiyas issus de l’argent sale. Il a déclaré que sa coalition présente des candidats propres de tout soupçon, là où de l’autre côté, le parti-Etat présente des candidats au passé douteux.
L’accueil à Chami
Il faut noter que la délégation de la Coalition de l’Alternance avait, tard dans la nuit, observé un arrêt dans la ville de Chami sur son chemin de retour en provenance de Nouadhibou vers Rosso. La délégation a reçu, malgré l’heure très tardive, un accueil chaleureux de la part de la population, notamment les nombreux orpailleurs qui ont exprimé leurs souffrances face à l’esclavage dont ils sont victimes de la part de la société aurifère canadienne Taziast et ses armées de tâcherons, avec la complicité de l’Etat mauritanien.
Se sont succédé au micro pour l’occasion plusieurs orateurs parmi lesquels, le candidat à la députation Zayed El Mouslimine Ould Maalainine et le candidat à la mairie Hamed Ould Sidi Lemine Ould El Vadhi.
Un discours galvaniseur de Birame qui a insufflé une véritable levée de boucliers contre les candidats locaux du parti INSAF et une salve à l’encontre du système politique en vigueur
Rosso et la restitution des terres spoliées
La population de Rosso avait rendez-vous durant la soirée du jeudi 11 mai 2023, ultime virage avant l’extinction des feux de la campagne, avec les candidats de la Coalition de l’Alternance et le discours enflammé de son leader.
La capitale du Trarza, fief de Birame Dah Abeid, a eu en effet l’honneur d’accueillir le meeting de clôture de la coalition Sawab-RAG, après quinze jours d’intenses tournées dans les quatre coins du pays. Rosso reste dans ce cadre une des citadelles de résistance où Birame, selon ses partisans, avait battu à plate-couture Aziz et Ghazouani lors de la présidentielle de 2019.
Durant cette soirée de clôture, les candidats de la coalition au Trarza ont ainsi défilé devant le micro, notamment les deux députés, Dame Fall et Hacen Taleb Khyarna, le maire de Rosso, Moussa Keîta et le président du Conseil régional, Hamoud Magha, ainsi que la chevronnée militante du mouvement IRA, Jemal Achour.
Dans son discours, Birame a donné à la population de Rosso une leçon sur la démocratie et sa finalité, qui est de changer les gouvernants qui ne satisfont pas les attentes du peuple. Il les a mis en garde contre la vente des consciences, soulignant que la carte d’électeur est la force qu’ils détiennent pour punir et chasser leurs mauvais élus, tels ceux qui se sont succédé à la tête de Rosso et du Trarza sans jamais avoir réalisé les attentes de la population et ses aspirations.
Il est temps, selon lui, de mettre fin à l’emprise des thuriféraires locaux, à l’image de Hacen Ould El hadj et de mettre fin à la spoliation des terres agricoles, au point où les paysans du Trarza n’ont plus de terre de culture. Leurs champs ont été distribués selon lui à la mafia locale et celle venant de Nouakchott, rappelant les douloureux calvaires des habitants de PK 10 et de Djeuk.
Il a cité parmi les injustices subies par les populations, les concours à caractère raciste, mettant en exergue le racisme ancré dans les consciences qui empêchent ainsi les tribus auxquels appartiennent par exemple ses deux candidats, Hacen Taleb et Ould MBoukhoukha, de venir les soutenir, au lieu de s’afficher dans les rangs du pouvoir par peur des représailles et des punitions collectives.
Il a attaqué le parti Massar qui n’existe pas, selon lui, hors du Trarza et n’a été créé que pour le combattre, dans une guerre par procuration dans laquelle des harratines sont utilisés pour l’abattre.
Pour Birame, la véritable bataille est celle de la présidentielle de 2024, soulignant que les candidats de la coalition sont connus pour leur virginité politique et leurs mains propres. Il a précisé que Ghazouani n’est pas fait pour la présidence et qu’il est mal entouré. Il a promis aux populations de Rosso et du Trarza, la restitution de leurs terres de culture au détours d’une véritable révolution agricole qu’il compte conduire s’il prend le pouvoir.
Il a ajouté que les héritiers du pouvoir de 1978 ne pensent qu’à eux-mêmes et à se reproduire au pouvoir, soulignant que chaque président qui vient crée sa propre classe d’hommes d’affaires, dont les ambitions se limitent à leur enrichissement personnel, quitte à détourner l’argent des projets d’infrastructures, telles les routes mal conçues, à gonfler les factures, à déverser sur le marché des médicaments falsifiés et des produits alimentaires périmés qui sèment la mort et la désolation.
C’est par ce discours qui a attiré plusieurs centaines de personnes que s’est achevé la campagne électorale de la coalition de l’Alternance.
Il faut noter que sur sa route vers Rosso, la délégation de la coalition a effectué un arrêt à Tiguint, 90 Km de Nouakchott où un accueil populaire et chaleureux lui a été réservé.
Samedi 13 mai sera le jour du verdict des urnes et la coalition espère en tirer un grand profit.
Cheikh Aïdara